2005 - Bienvenue à Chamarande

Ce texte a été écrit en 2005 suite à la reprise du long circuit rouge pour deux autres : un bleu et un rouge.

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 C’est un circuit de grande classe, amendé en 2004 à partir des plus belles classiques de grades 5 et 6 de l’ancien tracé, alors composé de plus de 70 passages allant de 3c à 6a environ ». En fait, au fil des décennies, le circuit d’origine déjà très long, c’est développé pour devenir un monstre de près de 80 voies de toutes difficultés, au point qu’on le qualifiait de « trop long », de « trop exposé » de « trop difficile à suivre dans le méandre des blocs et des remparts », justifiant ainsi l’abandon par les grimpeurs de nombreuses voies. Si bien qu’il fut proposé en 1995 une version en deux parties d’une quarantaine de passages chacun : l’un partant de La Cervelle et l’autre partant de la Dalle P.O pour se rejoindre au milieu sur le même bloc (1).

 Mais dix ans plus tard, bon nombre de voies était de nouveau sous la mousse car bien que coupé en deux, le tout avait gardé l’hétérogénéité d’origine et proposait toujours bien trop de voies mal lignées et exposées. Aussi, il fut proposé une nouvelle répartition de cet ensemble : en fait de réserver les plus belles voies de niveau « bleu » pour un circuit bleu (2) et les plus belles voies de niveau « rouge » pour un circuit rouge, le reste allant dans la cagnotte des hors circuits car même sans flèche, les lignes non reprises pour les circuits restaient du fait de la présence du rocher, potentiellement possibles pour ceux qui souhaitaient les faire.

 Je précise cela, car cette initiative a été d’abord mal vue par quelques habitués qui considéraient que ce qui faisait la voie en premier lieu, c’était la flèche ; et qu’à effacer les flèches des voies non retenues, c’était comme supprimer les voies. En réalité, tout cela n’est qu’une question de perception des choses, puisqu'à l’inverse, personne ne prétendra que les voies dites « hors piste », n’existent pas, au fait qu’elles ne sont pas montrées par des flèches. Mais eux étaient tellement convaincus que c’est la flèche qui fait la voie, que l’un des mécontents, sitôt que s’éloigna le fossoyeur de voies, revint sur les lieux du crime avec un petit pinceau et de la peinture rouge, et ressuscita les voies non retenues pour les circuits, si bien que parfois nous sommes retrouvés avec une flèche rouge à quelques centimètres d'une voie bleue dont l'axe était un peu orienté différemment car j'avais même oser une légère variation à la ligne précédemment désignée autrement. Mais pas toutes, certaines seulement, seulement celles qui étaient nées de leurs mains, elles étaient la sueur de leur front, que j’avais malheureux voulu faire disparaître à coup de décapant...

 Cette démarche m’intrigua, je dirais même plus, me laissa perplexe d’interrogation. Autant que la plupart les voies qui avaient retrouvées leurs couleurs demeuraient impraticables, abandonnées à la mousse, même pas entretenues par ceux-là même qui y tenaient. J’en conclus que leur importait l’épaisseur de mousse sur le rocher, que les grimpeurs fassent ou pas les passages, que le circuit du fait du caractère rebutant de certaines lignes soit sacrifié à l’inutilité, pourvu qu’il y est au moins une flèche pour indiquer que derrière la mousse là, il y avait un chemin.

Comprenez mon étonnement, car mon raisonnement était tout autre. Je me suis dit, que si les voies étaient envahies par la mousse, c’était parce que les grimpeurs ne s’y intéressaient pas, préférant les abandonner, « ouvreurs compris » soit parce qu’elles sont trop exposées, soit quelles sont besogneuses, malcommodes, souvent humide, isolées, sableuses…. Bref, que ce n’était pas moi mais que se sont les grimpeurs qui en quelques sorte n’avaient désignés les voies qui ne voulaient pas ; et que j’en avais tenues compte lorsque j’ai pris l’initiative de reprendre les deux circuits rouges hétérogènes peu satisfaisants, pour chercher faire deux circuits de niveaux différents, homogènes et motivants.

Yann dans Anti Rouille, pourtant ça déroule bien dans ce rouge.


« Vous avez fait n’importe quoi », finira par me dire l’un d’eux, avec l’assurance d’un juge de l’inquisition. Je ne pouvais avoir raison contre tous. En tout cas, c’est ainsi que j’ai compris que je voyais tout à l’envers. Que j’avais dépassé les limites de l’acceptable parce que j’avais cru qu’il était légitime de considérer le circuit comme un équipement sportif, un équipement qu’il fallait entretenir, voire refondre suivant la forme de pratique de son temps. Qu’en somme, les voies étaient les briques qu’un équipement collectif que l’on pouvait inclure ou retirer sans problème afin d’essayer au mieux d’augmenter la qualité d’un circuit. Et bien non, les voies ont parfois un papa et une maman et défense de toucher. Alors tant pis, on aura des triangles, à dix centimètres d’un autre marquage parfois, pour bien montrer qu’elles existent plus que la matière et éviter qu’on les oublis comme on oubli ses rêves.

  Aujourd’hui, ce n’est pas quelques voies qui sont oubliées, c’est le massif presque en totalité. Après un pique de fréquentation suite à la refonte des circuits, les grimpeurs ont fini par se lasser de Chamarande ; les ronces ont envahi certains pieds de blocs et des arbres se sont couchés sur d'autres interdisant l'escalade de certaines voies, et pourtant aucun des habitués n’a pris l’initiative de les dégager et pourtant ce sont de belles voies et pas du tout exposées. Pour sur, on y est tranquille si d'autres massifs c'est la foule...

Le Cervin. Un homme dans la directe...

Cath dans Le Portique, un rouge tout en placement. 


Gilles dans la traversée bleue bien subtile de Coup de Griffe